Bien avant la crise sanitaire déclenchée par le Covid-19, la situation touristique en Espagne était ingérable.

L’activité touristique était tellement désorganisée que les habitants de certains quartiers populaires – par exemple la Boqueria à Barcelone ou le quartier Gion à Kyoto, connu pour les geishas – donnaient le sentiment d’être dans une sorte de « safari humain ». Une “consommation touristique” excessive a été reconnue par les responsables du tourisme avant la pandémie et subie par les communautés d’accueil, conduisant à “la boulimie de voyager sous l’influence d’une apparence vorace”.

A l’arrivée de la prochaine saison touristique, le vrai problème, à la fois touristique et moral, n’est pas de remettre en cause la possibilité de voyager. Il s’agit plutôt de savoir si nous continuerons à voyager comme nous le faisions avant que la pandémie n’éclate. Si le contenu du voyage reste le même, la nature du tourisme peut changer. Pourra-t-on voyager de manière plus responsable, écologique et humaine, à la fois pour le bien de la planète et pour les personnes qui l’habitent ? Puisque nous sommes tous des touristes lorsque nous voyageons, personne n’est à l’abri de cette pensée.


L’hibernation touristique en Espagne

Le Covid-19 a changé et pourrait encore changer le comportement humain. Mais lorsqu’il s’agit de « comportement touristique », l’industrie a connu une sorte d’hibernation, notamment dans les villes, lorsque les hôtels et les restaurants ont fermé. Le centre-ville historique de Barcelone a changé depuis plus de 18 mois car il n’y a pas de restaurants et de bars réservés exclusivement aux touristes.

Parallèlement, on assiste à la saturation progressive des espaces naturels, par exemple à Gaspé, où l’on voit un afflux de touristes attirés par les paysages côtiers. Le maire de Gaspé s’est dit préoccupé par le fait que certains visiteurs campent là où ils le peuvent, ce qui nuit à l’environnement et dérange les résidents locaux. Ce phénomène n’a rien de paradoxal, au contraire, il montre que la horde touristique n’a pas disparu, mais s’est déplacée.

En 2020, plusieurs destinations de voyage ont souffert du manque de touristes. Cet « échec touristique » pouvait être vu à la une des quotidiens : « Covid-19 : Venise se meurt », « Tourisme : l’Espagne revient au niveau de 1969 », « Quitter la ville suisse de Lucerne nostalgique des hordes de touristes chinois”.

Le sentiment de nostalgie ressenti par les destinations touristiques avec délits de fuite semble paradoxal. Il s’agit d’un type de tourisme particulièrement visible dans les villes qui sont considérées comme une « destination du jour » ou une escale sur les routes de croisière. Dans le cas de Lucerne, en Suisse, les revenus du tourisme sont allés principalement dans les poches des marchands de montres de luxe du centre-ville, appréciés de nombreux touristes chinois.

Hormis les impacts économiques quantifiables, le tourisme n’est pas une activité exempte de problèmes sociaux. Alors que le tourisme est loué plutôt que critiqué, il est impératif que la possibilité d’un changement de paradigme dans ces pratiques soit remise en question afin de les réinventer. Nous vous proposons ici quatre pistes pour réinventer le tourisme de demain. Modèles pouvant être importés en Espagne.


Tourisme régénératif

Dans certaines parties du monde pendant la pandémie, il a été constaté que la nature avait repris ses droits. La faune est revenue dans des lieux autrefois envahis par les touristes, et la flore s’est régénérée grâce à son absence. Alors, pour sauver la planète, faut-il arrêter de voyager, ou du moins voyager de manière à favoriser le renouvellement progressif des lieux (urbains, ruraux et naturels) ?

Les voyagistes doivent faire de la publicité, sensibiliser et renforcer la viabilité d’une destination. Les touristes, quant à eux, devraient s’informer de ces limites et voyager en conséquence.


Tourisme durable

Comme le suggère le sociologue français Rodolphe Christin, il vaudrait mieux partir moins souvent, plus longtemps et plus lentement, par exemple en prenant des vacances près de chez soi. Apprendre à devenir un “voyageur de tous les jours” permettrait d’appliquer la célèbre maxime de Jost Krippendorf, l’un des pères fondateurs du tourisme durable : “C’est vos vacances, c’est votre quotidien”.

Compilé par le personnel du Conseil du PECO