L’entreprise allemande Litchblick jette un pavé dans la mare en dénonçant le manque de concurrence et le développement d’un monopole provoqué par la vente de quotas de CO2. En effet, depuis 2005, l’UE a mis en place un marché ETS (Emissions Trading Schemes) qui permet à toute grande entreprise d’acheter des crédits CO2 à une autre afin de rentrer dans les clous et d’atteindre les objectifs de l’Europe. Problème : en matière de recharge de véhicules électriques, seuls les exploitants de bornes peuvent revendre ces quotas.
En d’autres termes, si un producteur d’énergie « verte » souhaite également avoir droit à la revente de quotas, il doit le faire en installant ses propres bornes de recharge. S’il fournit son énergie à un opérateur tiers, c’est l’opérateur qui empochera l’argent ! Une situation dénoncée par Litchblick, qui concerne évidemment l’Allemagne, mais sans doute pas que : “la vente rentable des quotas de gaz à effet de serre exacerbe le déséquilibre massif des prix à la borne de recharge, les fournisseurs tiers de courant de recharge qui utilisent des colonnes d’autres opérateurs ne ne bénéficient pas du quota de GES lorsqu’ils facturent leurs clients…. C’est un désavantage flagrant dans la concurrence actuelle en matière de facturation”.
Nos confrères d’Automobilwoche le résument bien : « Les opérateurs de bornes de recharge comme Ionity gagnent des millions supplémentaires en Europe en vendant des droits d’émission aux entreprises qui rejettent trop de CO2 dans l’atmosphère. Or, les producteurs d’électricité verte ne profitent pas de cette manne s’ils n’utilisent pas leurs propres bornes de recharge mais vendent leur électricité via des fournisseurs tiers ». L’ionité est donc clairement citée ici.
Les revenus générés par la revente des quotas seraient de plus de 100 millions d’euros en 2022, rien qu’en Allemagne. Sur chaque kWh vendu au client, 0,25 € rentre dans la poche de l’opérateur selon Litchblick, qui ajoute : « au final, ce sont les conducteurs de voitures électriques qui souffrent, car ces revenus ne conduisent pas à une expansion ou à une amélioration de l’infrastructure de recharge, et n’ont pas non plus d’effet à la baisse sur les prix… bien au contraire : malgré ce revenu supplémentaire des opérateurs de bornes de recharge, certains d’entre eux continuent d’augmenter leurs prix », dénonce Litchblick qui a évidemment un intérêt personnel à voyant ce marché évoluer, puisque l’entreprise est un fournisseur d’énergie solaire. Par ailleurs, Licthblick propose un nouveau format : « que les fournisseurs d’électricité puissent proposer du courant de recharge aux bornes de recharge tierces à leurs tarifs via un modèle pass-through. Dans un tel modèle, selon le fournisseur d’électricité, le quota de GES irait au fournisseur d’électricité, qui l’échangerait ensuite. Le produit de la transaction serait alors reversé aux clients (renouvelables) ». Mais cela ne changerait rien à l’idée de départ, à savoir que des quotas sont achetés par les pétroliers à des opérateurs de charge ou à des producteurs d’électricité “verte” pour rentrer dans les clous. Évidemment, l’objectif est d’avoir un continent européen, dans son ensemble, qui réalise des objectifs communs en matière de CO2, mais l’affaire reste rentable pour les opérateurs !