La République tchèque entend prioriser les produits locaux dans ses supermarchés
La République tchèque entend prioriser les produits locaux dans ses supermarchés

La République tchèque est en passe d’introduire une loi agroalimentaire protectionniste malgré les avertissements selon lesquels une telle démarche pourrait constituer une violation à la libre circulation des marchandises au sein de l’UE.

La Chambre basse du parlement tchèque a approuvé un amendement à la loi agroalimentaire tchèque mercredi (20 janvier) en vertu duquel les commerces d’une superficie supérieure à 400 m² seront tenus de vendre une part minimale obligatoire de produits locaux à partir de 2022.

Ce quota devrait être élevé à 55 % l’année prochaine dans le but d’augmenter progressivement vers 73 % d’ici à 2028.

La proposition a été présentée par le parti de droite Liberté et Démocratie directe (SPD) et appuyée au sein de la coalition gouvernementale (ANO/ČSSD) grâce au soutien de parti Communiste (KSČM).

L’objectif ? Atteindre l’autosuffisance dans la production agroalimentaire et soutenir la filière agricole locale.

Avant le vote, le ministre de l’Agriculture Miroslav Toman (sociaux-démocrates, ČSSD) a appelé les députés du parlement à adopter une approche « quelque peu nationaliste » en ce qui concerne les denrées alimentaires tchèques.

Quid de la libre circulation des marchandises au sein de l’UE ?

Bien que la Commission européenne ne se soit pas exprimée à ce sujet, un représentant européen a fait savoir à Euractiv que « la liberté des marchandises et des services au sein du marché unique était non seulement notre pilier le plus important afin de garantir l’approvisionnement à travers l’Union, mais également notre meilleur instrument pour garantir une reprise générale », ajoutant que « toute restriction locale avait un effet contre-productif ».

« Il est crucial que les mesures nationales d’urgence ne contreviennent pas aux valeurs et principes fondamentaux entérinés dans les Traités de l’UE ».

L’exécutif européen analysera la législation tchèque une fois adoptée. « Pour l’heure, nous ne pouvons pas émettre de supposition à cet effet ».

Néanmoins, une source européenne proche du dossier a récemment dévoilé à Euractiv que si la loi était adoptée, de telles mesures créeraient sans aucun doute « des conditions de commercialisation privilégiées pour les produits tchèques », allant ainsi à l’encontre d’autres producteurs du secteur alimentaire européen et transgressant le principe de libre circulation des marchandises.

De plus, de telles règles viendraient perturber la chaîne d’approvisionnement et de distribution du navire européen, étant donné qu’elles sont contraires à la liberté d’établissement.

Parmi les États membres, huit ont déjà exprimé leur opposition à ce projet de loi, notamment l’Allemagne et la France, comme l’indique le Hospodarske noviny.

Le Premier ministre tchèque Andrej Babiš a maintenu qu’il « n’était pas l’instigateur de cette proposition et ne la soutenait pas ».

« D’après moi, il s’agit d’un processus politique inutile qui viole les principes du marché unique », a-t-il renchéri.

Cependant, la proposition est passée par son gouvernement et a été approuvée par les députés de son parti.

Les leaders de l’opposition ont qualifié le projet de « ridicule », arguant qu’il s’agissait « d’une des pires lois de l’histoire tchèque ». Les opposants, eux, ont déploré le fait que l’amendement ne viendrait en aide qu’aux gros conglomérats agroalimentaires, notamment la société de holding Agrofert, anciennement détenue par M. Babiš.

Les critiques se sont également élevées du côté de la Confédération du commerce et du tourisme, la Chambre du commerce, la Confédération de l’industrie et la Chambre de l’alimentation. En outre, nombre d’associations ont aussi averti que la nouvelle loi pourrait entraîner des répercussions néfastes sur le prix, la qualité et la disponibilité des denrées alimentaires.

En revanche, le projet de loi a été salué par la Chambre de l’agriculture, qui représente les grandes entreprises du secteur agroalimentaire.

« Nous espérons que le Sénat renverra cette loi à la Chambre basse », a fait savoir Tomáš Prouza, président de la Confédération tchèque du commerce et du tourisme. Toutefois, la Chambre basse a davantage de compétences que le Sénat, la nouvelle loi pourrait donc entrer en vigueur sans l’approbation de la Chambre haute.

Compilé par le personnel du Conseil du PECO